Dans une lettre, une centaine d'ONG dénoncent, jeudi, une nouvelle législation israélienne les empêchant d'intervenir à Gaza. Soixante demandes d'aide ont été rejetées pour le seul mois de juillet. C'est le cas si les autorités israéliennes estiment qu'une ONG nie le caractère démocratique d'Israël ou "promeut des campagnes de délégitimation" contre le pays.
Les grandes ONG internationales n'ont pas encore pu livrer d'aide humanitaire à Gaza. Dans une lettre publiée, jeudi 14 août, plus de cent ONG étrangères dénoncent la nouvelle législation israélienne utilisée pour refuser leurs demandes.
"Les autorités israéliennes ont rejeté les demandes de dizaines d'ONG pour apporter des biens de première nécessité (à Gaza), affirmant que ces organisations "ne sont pas autorisées à fournir de l'aide"", indique la déclaration commune.
"Malgré les déclarations des autorités israéliennes selon lesquelles il n'y a pas de limite à l'entrée de l'aide humanitaire à Gaza, la plupart des grandes ONG internationales n'ont pas été en mesure de livrer un seul camion de fournitures vitales depuis le 2 mars", accuse la lettre.
Selon le document, dont les signataires incluent Oxfam et Médecins Sans Frontières (MSF), au moins 60 demandes d'aide pour Gaza ont été rejetées rien qu'en juillet.
Elle cite l'exemple de l'ONG Anera qui "dispose de plus de 7 millions de dollars de fournitures vitales prêtes à entrer à Gaza, y compris 744 tonnes de riz, suffisantes pour six millions de repas, bloquées à Ashdod (Israël) à seulement quelques kilomètres" de Gaza.
Idem pour Care et Oxfam, dans l'impossibilité de livrer à Gaza respectivement pour 1,5 million et 2,5 millions de dollars de diverses fournitures.
En mars, le gouvernement israélien a approuvé un nouvel ensemble de règles pour les organisations non gouvernementales étrangères travaillant avec les Palestiniens.
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Cette loi met à jour le cadre régissant la manière dont les groupes d'aide doivent s'enregistrer pour maintenir leur statut en Israël, ainsi que des dispositions qui précisent comment leurs demandes peuvent être refusées ou leur enregistrement annulé.
L'enregistrement peut être refusé si les autorités israéliennes estiment qu'un groupe nie le caractère démocratique d'Israël ou "promeut des campagnes de délégitimation" contre le pays.
"Malheureusement, de nombreuses organisations d'aide servent de couverture pour des activités hostiles et parfois violentes", a déclaré le ministre israélien de la Diaspora Amichai Chikli à l'AFP.
"Les organisations qui n'ont aucun lien avec des activités hostiles ou violentes et aucune connexion avec le mouvement de boycott se verront accorder l'autorisation d'opérer", a ajouté Amichai Chikli, dont le ministère met en œuvre ces directives.
Millions de dollars d'aide bloqués dans des entrepôts
Les ONG affirment cependant que ces nouvelles règles laissent les Gazaouis sans aide.
"Notre mandat est de sauver des vies, mais en raison des restrictions liées à l'enregistrement, les civils se retrouvent sans la nourriture, les médicaments et la protection dont ils ont un besoin urgent", a déclaré Jolien Veldwijk, directeur de l'organisation caritative Care dans les territoires palestiniens.
"Aujourd'hui, les craintes des ONG internationales se sont avérées vraies : le système d'enregistrement est désormais utilisé pour bloquer davantage l'aide et refuser nourriture et médicaments au milieu du pire scénario possible de famine", accuse la lettre.
"Cette obstruction (par Israël) a laissé des millions de dollars de nourriture, de médicaments, d'eau et d'articles d'abri bloqués dans des entrepôts en Jordanie et en Égypte, tandis que les Palestiniens sont affamés", déplorent les ONG.
Israël accuse depuis longtemps le Hamas de détourner l'aide entrant dans la bande de Gaza, et depuis mai, le gouvernement s'appuie sur la Fondation humanitaire de Gaza (GHF) soutenue par les États-Unis pour gérer les centres de distribution alimentaire
Alors que des milliers de Gazaouis se pressent chaque jour vers ses centres, ces opérations se déroulent souvent dans le plus grand désordre, voire le chaos, et sous les tirs israéliens pour tenter d'y contrôler les foules.
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Au moins 1 373 Palestiniens ont été tués à Gaza depuis le 27 mai, la plupart par des tirs israéliens, "alors qu'ils cherchaient de la nourriture", avait rapporté fin juillet l'ONU.
Des ONG étrangères et l'ONU ont refusé de coopérer avec la GHF, qu'elles accusent de servir les besoins militaires d'Israël, notamment en poussant des habitants de Gaza à se rapprocher des centres de distribution.
Surtout, ces ONG redoutent d'être interdites d'activité en Israël et dans les Territoires palestiniens si elles ne transmettent pas au gouvernement israélien des informations sensibles sur leur personnel palestinien.
La date limite pour soumettre ces données est fixée à septembre, après quoi "nombre d'entre elles pourraient être contraintes de cesser leurs opérations à Gaza et en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, et de retirer tout leur personnel international sous 60 jours".
Avec AFP